1967 - Les Monstres de l'espace

1967
Les Monstres de l'espace
Film de Roy « Ward » Baker

Auteur d’une large filmographie qui reste finalement assez neutre, le réalisateur britannique Roy « Ward » Baker a pourtant, via quelques films, laissé une marque indélébile sur le cinéma et la télévision anglais. Faiseur consciencieux, voire parfois inventif, Baker n’a jamais autant brillé que lorsqu’il illustrait l’œuvre de scénaristes de génie. Ainsi, deux de ses films majeurs tiennent avant tout à la qualité des scripts : Dr Jekyll et Sister Hyde (scénario de Brian Clemens), et Les Monstres de l’espace (scénario de Nigel Kneale). Ce dernier, tourné en 1967, est une œuvre de science-fiction majeure, et qui trouve, une fois n’est pas coutume, le réalisateur au sommet de son art. Ce n’est pas pour rien que le film est devenu une référence du cinéma fantastique – surtout pour John Carpenter.

Dans cette troisième mouture cinématographique, le professeur Quatermass se voit mêlé à une énigme scientifique : la découverte, sur les lieux d’une extension du métro londonien, d’une navette vraisemblablement d’origine extraterrestre, enterrée là depuis des millions d’années.

Ce que fait John Carpenter, en réalisant sa trilogie de l’apocalypse. Celle-ci comprend The Thing (1982), Prince des ténèbres (1987) et L’Antre de la folie (1994). On a déjà souligné les liens de ce triptyque avec Quatermass and the Pit, en cela que les films sont l’œuvre de cinéastes ayant pleinement compris l’essence du mal créé dans ses écrits par H.P. Lovecraft. Le caractère incompréhensible, absolu de la malveillance des êtres du mythe lovecraftien est, à l’époque de leur création par l’auteur, résolument unique – une monstruosité purement fictionnelle, mais qui pourtant évoque les terreurs les plus primales tapies au fond de la psyché humaine, au fond des mythes qu’il crée pour lui-même, tel que celui du Diable polymorphe, et du pain bénit pour qui se pique de dépeindre la peur à l’écran. L’Antre de la folie et The Thing multiplient les clins d’œil subtils à Quatermass and the Pit : ainsi, le nom du village dans lequel se résout l’intrigue de L’Antre…, Hobb’s End, est une référence littérale à la station de métro londonien dans laquelle se déroule le film de Roy Ward Baker. Dont John Carpenter n’a jamais fait mystère de son désir de réaliser un remake…

Le discours sur le rejet d’un autre différent, sur la nécessité atavique d’une uniformité sociale, sur l’impossibilité pour l’individu prétendument civilisé d’échapper à cet instinct de meute, résonnent autant chez Roy Ward Baker, chez John Carpenter que chez Fritz Lang : M, Metropolis, pour ne citer qu’eux. Un véritable miracle de cinéma : que l’on puisse lier les œuvres les plus prestigieuses aux plus obscures, les plus grandioses, exigeantes aux plus populaires, dans un même effort d’ouvrir les yeux de l’homme, de tenter de le rendre meilleur.

La bande annonce

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